Orateur: Matthieu Chevallier
exposé
Le recul accéléré de la couverture de glace de mer de l'océan Arctique entraîne un regain d'intérêt pour l'étude de sa prévisibilité à l'échelle saisonnière. Les applications potentielles sont nombreuses : navigabilité de certaines voies maritimes, libération des eaux d'un port, accessibilité des ressources halieutiques, cynégétiques et potentiellement énergétiques. La prévision du minimum d'étendue estival (en septembre) à l'aide d'un modèle nécessite une bonne estimation du volume de glace, mais aussi de la variabilité du forçage atmosphérique durant l'été. Ces deux paramètres se sont avérés décisifs dans la survenue ou non des records d'englacement des cinq dernières années. Durant l'hiver, la variabilité de la position du bord de glace est déterminée par les grandes structures atmosphériques (AO/NAO) ainsi que les flux océaniques en provenance de l'Atlantique et du Pacifique. Il est donc crucial de bien modéliser les rétroactions entre la glace de mer et l'océan ou l'atmosphère, et bien capturer la variabilité de ces deux milieux.
Le modèle couplé CNRM-CM5.1 est utilisé pour des expériences de prévision "rétrospectives" (ou « hindcast ») de la couverture de glace de mer Arctique sur la période 1990-2008. La configuration retenue est au plus proche de la version utilisée pour les simulations climatiques du projet CMIP5 (préparation du 5e rapport du GIEC). Notre but est de vérifier que la variabilité simulée par le modèle de prévision est comparable à la variabilité observée de la couverture de glace de mer Arctique. Pour initialiser l'océan et la glace de mer, nous utilisons une réanalyse réalisée avec le modèle NEMO3.2-Gelato5 (composante océanique de CNRM-CM5.1) forcé par ERA interim. Le modèle simule correctement la variabilité de l'englacement Arctique (étendue et volume) des 20 dernières années en toute saison, ce qui rend possible l'initialisation du système de prévision avec des anomalies d'englacement réalistes.
Les expériences sont initialisées au 1er mai, 1er août et 1er novembre pour les prévisions de la couverture de glace Arctique de septembre, décembre et mars. Un biais systématique est visible dans l'englacement de septembre. Nous attribuons ce biais au schéma radiatif du modèle d'atmosphère, notamment à une mauvaise représentation de la couverture nuageuse en Arctique. Néanmoins, la qualité de la variabilité simulée du volume de glace de mer permet à l'anomalie de surface de glace de mer Arctique de septembre d'être bien prévisible. Les performances du système sont également très bonnes pour la prévision de l'englacement de mars. Ceci est notamment dû à une bonne représentation par le modèle des interactions couplées océan-glace-atmosphère à l'oeuvre dans les mers nordiques. Des tests de sensibilité sont actuellement en cours sur l'impact de certaines paramétrisations physiques sur la prévisibilité mise en évidence dans cette étude.